Page 22 - Cadre GESI
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Cadre pour la parité femmes-hommes et l’inclusion sociale
Former la prochaine génération de spécialistes des eaux
souterraines au Sahel
Maintenant que les eaux de surface sont menacées par le Par suite de l’insuffisance des ressources de l’université, le
changement climatique en Afrique, les eaux souterraines nombre d’étudiants qui s’inscrivent au programme
deviennent une ressource vitale inexploitée. Pourtant, les d’hydrogéologie est près de cinq fois supérieur au nombre de
connaissances limitées sur les ressources en eaux places disponibles — qui est bien insuffisant pour répondre aux
souterraines du Sahel, point chaud du changement climatique besoins de la région dans le domaine de la gestion des eaux
et l’une des régions les plus pauvres du monde, entravent les souterraines. La table ronde a par ailleurs clairement montré
efforts entrepris pour définir des stratégies permettant de que la qualité de la formation était inégale à travers le Sahel, de
faire face à la pénurie d’eau. Le nombre d’hydrogéologues sorte que certains étudiants ne peuvent pas se former aux
formés à la gestion durable des eaux souterraines est de sciences de la terre et ainsi acquérir des compétences de base
surcroît insuffisant. en géologie ou obtenir des stages ou des emplois.
CIWA joue un rôle primordial en mobilisant les parties L’examen de ces difficultés et de ces opportunités communes
prenantes dans le but d’accroître le nombre limité de aux six pays a contribué à renforcer les liens de confiance et de
spécialistes des eaux souterraines du Sahel et renforcer leurs coopération. « Nous partageons certains bassins, avons le
compétences. Il a apporté son soutien à une table ronde de même climat, des contextes socio-économiques similaires et
sept jours organisée en mars 2022 à Nouakchott (en manquons tous de ressources en eau », note Mme Faye. « Il
Mauritanie), qui a permis à des universitaires chargés de la était dans notre intérêt de mettre en commun nos ressources
formation des spécialistes des eaux souterraines dans six pays et de créer un programme unique qui permettra aux
d’identifier les principales lacunes que présente cette universités de procéder à des échanges d’étudiants et de
formation et de formuler des solutions. compétences… ce qui peut être profitable à tous les pays. »
Le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal, et Mme Faye estime que CIWA peut continuer à jouer « un rôle
le Tchad ont pris la décision d’améliorer la qualité de la décisif en facilitant les rencontres entre les établissements de
formation de premier cycle pour inciter les étudiants formation spécialisés dans les ressources en eau de différents
intéressés à se spécialiser dans les eaux souterraines et de pays, en créant des cadres de réflexion pour améliorer les
créer un programme commun de maîtrise en hydrogéologie, connaissances, en identifiant les lacunes et en trouvant des
ce qui pourrait changer la donne. De nombreux Sahéliens qui solutions ensemble. »
souhaitent faire carrière dans les eaux souterraines doivent
poursuivre leurs études universitaires dans un pays étranger Les participants à la table ronde ont accueilli très favorablement
pour obtenir des diplômes de haut niveau et peuvent alors le programme de maîtrise envisagé. Ce dernier, dont l’élaboration
décider de rester dans ce pays pour y travailler. Un et la mise en place devraient prendre trois ans, permettra
programme de maîtrise local pourrait inverser cette tendance d’exploiter les précieuses ressources en eaux souterraines de la
et renforcer les compétences spécialisées de la région. région. « C’est une excellente idée », dit-elle. « Cela sera
extraordinaire, vraiment fantastique ».
« Cette table ronde a permis d’approfondir la réflexion, de
partager les expériences de chaque pays, de combler les lacunes
et de trouver des solutions », a déclaré Mme Seynabou Cisse
Faye, hydrogéologue senior et professeure associée, responsable
de la formation en hydrogéologie au département de géologie de
l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Sénégal).
Confrontée au défi consistant à accroître le nombre de
femmes dans le département de géologie, Mme Faye a décidé
de se tourner vers le domaine des eaux souterraines : « La
géologie n’était pas une discipline très attrayante pour les
femmes, et la formation des femmes ne suscitait guère
d’enthousiasme. » note-t-elle.
« Je me suis demandé pourquoi le
nombre de femmes était si faible.
C’est ce qui m’a poussé à
m’engager dans ce domaine »,
explique Mme Faye, dont les travaux universitaires portent
notamment sur la vulnérabilité et la pollution des systèmes
aquifères dans les zones urbaines, les régions minières et
agricoles, et sur la contribution des outils isotopiques à
l’étude de la pollution. Elle a finalement accédé au poste de
chef du département géologie de 2017 à 2021 et dirige
aujourd’hui le programme de maîtrise en hydrogéologie.
Elle est également responsable scientifique du laboratoire
d’hydrochimie du département.
Mme Faye a elle-même constaté combien il était difficile de
recruter des étudiants intéressés par le métier de spécialiste
en eau souterraine dans son université. « Notre principal
problème à l’heure actuelle est la formation », dit-elle. ©Jorge Trevino/CIWA — Fleuve Chari vu de la CBLT, février 2022
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